Edito du n° 46
Dès qu’un livre a deux ans, un distributeur (qui gère le stock, réalise les envois et facture les points de vente) peut dire à l’éditeur du titre «Que comptes-tu faire de ce stock?». La plupart du temps, il s’agit de déterminer si le titre sera soldé (mais auprès de qui désormais?) ou détruit, à moins que l’éditeur puisse le stocker par ses propres moyens (car il n’est souvent pas en mesure de payer l’immobilisation des invendus).
Jusqu’à récemment, les éditeurs de JdR n’avaient jamais été confrontés à cette problématique. Il existait un distributeur très conscient des spécificités du JdR. Il était critiqué sur bien des points par les éditeurs qui ne voyaient pas ce service gratuit qu’il leur apportait. Depuis sa disparition, l’augmentation du nombre d’éditeurs de jeux de société et les changements d’habitude des consommateurs ont bouleversé cet usage. La distribution est en train de sensibiliser les éditeurs à leur problème d’immobilisation de stock, tout en leur faisant remarquer qu’un livre qui dort dans un hangar depuis plus de deux ans n’intéresse, selon eux, plus personne. C’est oublier que le joueur l’ignore, lui, se fiant à ce qu’il trouve en boutique.
Les éditeurs devraient sans doute faire cause commune, se dotant d’une boutique en ligne spécialisée dédiée à leur production, mais à qui confier la gestion d’une telle entreprise? Ces mêmes éditeurs n’arrivent déjà pas à s’entendre sur une mutualisation de certaines ressources alors qu’ils impriment, par exemple, au même endroit et que donc leur stock part des mêmes entrepôts pour aller chez le même distributeur, chacun avec son petit camion.
Derrière ces difficultés, il n’y a qu’une question: à qui confier le secret des chiffres réels de ventes? Eh bien, Mesdames, Messieurs les éditeurs, n’ayez pas peur! Les consommateurs ne regardent pas que la jauge des euros qui s’accumulent lors des opérations participatives. Ils sont attentifs à la participation. Ils sont par conséquent conscients que les acheteurs, parmi tous les passionnés de notre loisir, sont souvent les MJ. En outre, vos confrères du livre ont accès aux chiffres de tout leur marché. Ils savent qui vend bien, qui vend moins bien, mais ils savent aussi que ce qui vend n’est pas synonyme de qualité littéraire ou éditoriale, il est le fait d’une tendance, d’un appétit du moment, et cela ne les empêche pas de publier d’excellents manuscrits de faible audience, car chaque livre trouve toujours ses lecteurs grâce à des contenus tiers éditorialisés, comme JdR Mag.
Sébastien Célerin
Si vous souhaitez ce numéro, c’est ICI.
En version numérique, c’est ICI.